7 idées reçues démystifiées
#1. « Une bouteille de vin bio coûte forcément cher »
Faux !
Tout comme pour les vins conventionnels, il existe des vins bio dans toutes les catégories de prix. Et les vins bio ne sont pas forcément plus chers que des vins qui ne le sont pas.
Certes, la main-d’œuvre est généralement plus élevée en bio. On estime qu’un emploi en viticulture conventionnelle équivaut à 1,5 emploi en bio, car les pratiques demandent plus de temps et de personnel. Sans recours aux produits chimiques de synthèse, les vignerons bio doivent effectuer manuellement ou mécaniquement certaines tâches, comme le désherbage entre les rangs et les ceps. De plus, une surveillance plus fréquente des vignes est nécessaire pour ajuster les méthodes de traitements naturels. Ce surcroît de travail requiert davantage de personnel et d’efforts, ce qui se répercute sur les coûts de main-d’œuvre. Par ailleurs, le coût de la main-d’œuvre varie également en fonction de la géographie : il est plus difficile de mécaniser l’entretien de parcelles en pente qu’en plaine, ce qui implique un besoin accru en personnel pour les vignes situées sur des terrains escarpés. Toutefois, ces coûts ne sont qu’un facteur parmi d’autres.
En effet, le coût de revient d’un vin est aussi déterminé par le temps qu’il passe en élevage ou par le packaging.
En outre, le prix final payé par le consommateur peut aussi dépendre de la loi du marché : la réputation d’un vin peut influer sur son prix. Pour donner une idée, les cavistes interviewés à Paris et à Montpellier pour le site levinbio.fr proposaient tous un large choix de cuvées certifiées bio à moins de 10 euros !
#2. « Les raisins sont bio, mais ce qui se passe en cave n’est pas contrôlé »
Faux !
Depuis 2012, il ne suffit plus que les raisins proviennent de l’agriculture biologique pour produire un vin bio. Le règlement européen sur l’agriculture biologique régule désormais l’ensemble du processus, de la vinification à l’élevage, en passant par le conditionnement et la distribution des vins.
En vinification bio, 100 % des raisins doivent être issus de l’agriculture biologique, tout comme les ingrédients agricoles utilisés, tels que le moût concentré pour enrichir, les liqueurs de tirage pour les vins effervescents ou encore l’alcool de mutage pour les vins doux naturels.
En viticulture biologique, environ la moitié seulement des additifs et auxiliaires autorisés en viticulture conventionnelle est permise. Parmi les substances interdites, on trouve par exemple le dicarbonate de diméthyle ou l’acide sorbique. Les vignerons bio réduisent par ailleurs leur utilisation d’additifs et auxiliaires, en limitant au maximum ceux qui se retrouveront dans le produit final.
Les sulfites, bien que permis, sont soumis à des limites maximales plus strictes qu’en conventionnel. De plus, de nombreux vignerons bio réduisent leur utilisation de sulfites et proposent de plus en plus de cuvées sans sulfites ajoutés.
Enfin, certaines technologies, comme les techniques soustractives (par exemple les échangeurs de cations pour l’acidification), sont généralement interdites en bio.
Pour garantir le respect du cahier des charges de la viticulture biologique, chaque opérateur est soumis à une inspection physique au moins une fois par an. Cette inspection inclut un audit de terrain, visant à vérifier les pratiques dans les vignes et les chais, ainsi qu’un audit administratif qui comprend l’analyse des factures, des bons de livraison, des certifications des fournisseurs et la traçabilité de l’élaboration des vins de la vigne à la bouteille.
#3. « Le vin bio a un goût spécial »
Vrai et Faux !
D’après une étude, le vin bio aurait meilleur goût. C’est la conclusion de deux chercheurs français, Magali Delmas (Université de Californie à Los Angeles) et Olivier Gergaud (Kedge Business School à Bordeaux), après avoir analysé les notes obtenues, souvent à l’aveugle, de 128 182 vins français. Leur étude, publiée en 2021 dans Ecological Economics, montre que, toutes choses égales par ailleurs, les vins bio obtiennent en moyenne des notes supérieures de 6,2 points (sur 100) par rapport aux vins conventionnels. Selon les chercheurs, la démarche du bio améliore la qualité finale du vin. Ils s’appuient notamment sur des études montrant que la réduction des pesticides de synthèse préserve la faune et la vie microbienne des sols, des facteurs qui vont influer favorablement sur la qualité des raisins.
En effet, lors de dégustations, certains sommeliers soutiennent que les vins bio se distinguent par une plus grande pureté des arômes et des bouquets plus intenses et plus diversifiés. Des vignerons nous ont également confié avoir constaté une plus grande profondeur dans leurs vins depuis leur conversion au bio grâce à des sols plus vivants qui favorisent un système racinaire des vignes plus développé, leur permettant ainsi de mieux capter l’ »effet terroir ». Cependant, il est encore dur d’établir un lien de corrélation entre l’élaboration d’un vin bio, avec des raisins issus de l’agriculture biologique et son goût.
Les vins bio, dans leur incroyable diversité, sont donc avant tout le reflet de leurs cépages, de leurs terroirs, de leurs techniques de vinification (par exemple, le vieillissement dans les fûts de bois qui confère certains arômes) et de la “patte” du vigneron.
#4. « Des vignes cultivées avec des pesticides peuvent devenir bio du jour au lendemain »
Faux !
Pour obtenir la certification bio, une vigne doit respecter une période de conversion d’une durée de trois ans. Pendant cette transition, il doit strictement respecter le cahier des charges de l’agriculture biologique. Cette démarche vers la production biologique implique de repenser les méthodes de travail dans l’ensemble du vignoble pour mettre en place de nouvelles pratiques culturales (au niveau des sols, des traitements des vignes…) afin de s’affranchir totalement des produits de synthèse.
Cette durée est essentielle pour permettre aux vignes de s’adapter à la nouvelle gestion et d’atteindre leur équilibre. Dès la deuxième année de conversion, les bouteilles de vin peuvent présenter sur l’étiquette la mention « Produit en conversion vers l’agriculture biologique » ou « Vin en conversion vers l’agriculture biologique« . Dès la première année de conversion, puis une fois la labellisation obtenue, un contrôle et un audit sont effectués chaque année dans les vignes et au chai par un organisme indépendant pour s’assurer du bon respect des règles de production.
#5. « Les vins bio se conservent moins bien »
Faux !
Quand on parle de conservation, on pense notamment aux sulfites utilisés comme additifs lors de la vinification. En effet, cet élément chimique aux propriétés antiseptiques et antioxydantes permet au vigneron de contrôler plus facilement la fermentation et de protéger le vin du risque d’oxydation. Alors, comme tout intrant œnologique, son utilisation est encadrée et régulée : si les limites maximales de sulfites (SO2) autorisées sont de 150 milligrammes par litre pour sur les vins rouges conventionnels et 200 milligrammes par litre pour les vins blancs et rosés conventionnels, elles sont de 100 milligrammes par litre pour les vins rouges biologiques et à 150 milligrammes par litre pour les vins blancs et rosés biologiques.
Les vins bio sont donc élaborés avec moins de sulfites que les vins conventionnels, mais cela ne signifie pas nécessairement que les vins bio se conserveront moins bien. Pour garantir un vin de bonne qualité qui s’appréciera dans le temps, les vignerons adoptent d’autres pratiques, liées à une grande maîtrise technique et de nombreuses précautions, tels qu’un contrôle rigoureux de la propreté des outils de vinification, ainsi qu’une attention particulière à la qualité et à l’état sanitaire des raisins. De plus, les tanins présents dans les vins rouges (issus des peaux, pépins et rafles) agissent comme conservateurs naturels, contribuant à leur stabilité. En revanche, en cas de vins blancs ou rosés « sans sulfites ajoutés », il peut être recommandé de suivre des indications précises concernant les délais de consommation et les conditions de conservation.
#6. « Avec le changement climatique, il sera bientôt impossible de cultiver des vignes en bio ! »
Faux !
Le changement climatique affecte la vigne, quelle que soit la méthode de culture. Même si l’impact diffère selon la région ou le cépage, les cycles végétatifs sont de plus en plus précoces, la floraison se produit plus tôt et les vendanges sont avancées.
D’après l’agroclimatologue Serge Zaka, les vignes cultivées en agriculture biologique seraient mieux préparées à faire face aux défis posés par l’augmentation des températures et le stress hydrique (manque d’eau). En effet, la gestion en agriculture biologique présente des avantages en termes de résilience au niveau de la parcelle, notamment pendant la phase de maturation estivale. Sans l’usage de produits chimiques de synthèse, les viticulteurs en bio développent des stratégies alternatives de conservation des sols : plantation d’arbres et de haies en bordure ou au cœur des parcelles. En favorisant la présence de biodiversité (notamment les vers de terre !), l’eau s’infiltre donc mieux et les racines pénètrent plus profondément. Ces sols vivants peuvent ainsi retenir jusqu’à 10 % d’eau en plus, aidant ainsi les vignes à mieux résister aux épisodes de sécheresse.
#7. « La conversion au bio n’est pas viable »
Faux !
L’agriculture conventionnelle, en adoptant une approche productiviste, mise sur l’utilisation de produits chimiques de synthèse pour sécuriser les récoltes. Toutefois, les intrants finissent par polluer l’air, les eaux et les sols, ce qui nuit à la biodiversité. Lorsque l’on prend en compte les coûts de dépollution et les risques d’épuisement des terres ainsi que la perte de biodiversité, il devient clair que les avantages de ces rendements élevés sont largement compensés par leurs impacts négatifs.
À l’inverse, l’agriculture biologique cherche à renforcer la résilience naturelle des cultures face aux aléas climatiques et aux parasites, sans recours aux produits chimiques de synthèse. Bien que les rendements soient généralement inférieurs de 15 % à 20 % après une conversion au bio, ces pratiques offrent des externalités positives pour l’environnement, assurant ainsi la pérennité des terres cultivées. Sur le plan économique, l’augmentation du prix d’une bouteille de vin bio peut permettre de compenser la baisse de rendement. De son côté, l’économiste Harold Levrel défend le principe d’un soutien financier de l’État, avec des aides à la conversion et au maintien de l’agriculture biologique au regard des services que le bio rend à la collectivité tout entière, considérant qu’il s’agirait de la meilleure solution pour promouvoir l’agriculture biologique sans impacter le pouvoir d’achat des consommateurs.